Système urinaire

les Reins

2 infatigables filtres
Deux infatigables filtres
De l'urine, notre corps en rejette, chaque jour, un litre et demi. Mais pour la produire, ce sont quelque 180 litres de sang que nos reins ont dû filtrer.

Un liquide jaune pâle, un peu acide, qui dégage vite une légère odeur d'ammoniac. Un mélange de divers produits chimiques et déchets indésirables, d'eau, de sels minéraux...
Chaque jour, il en sort des reins 1,5 litre en moyenne. C'est assez peu, certes. Mais la production de ce volume d'urine demande aux reins un travail de titan.
Pour l'obtenir, il leur aura fallu filtrer quelque 180 litres de sang, sans compter les globules. Ce qui revient à épurer en boucle, plus de 60 fois de suite, tout le sang du corps. Un grand nettoyage sanguin, une fois toutes les demi-heures...

Dans un premier temps, le rein ne fait pas dans le détail. Il prend tout ce qui lui tombe sous la main, ou presque.
Le système de filtre est assez simple :
----- d'un côté, le sang, qui entre dans les reins et y chemine dans de fins capillaires, à haute pression.
----- de l'autre, un ensemble de tubes microscopiques, prêts à recueillir la future urine.
Et entre les deux, une très fine barrière, qui laisse très facilement passer l'eau. Poreuse, mais pas trop, elle barre la route aux globules sanguins et aux grosses molécules, comme l'albumine.
Pour traverser sans écueil et se retrouver côté urine, une seule condition : mesurer moins de 3 millionièmes de millimètres. Globules, plaquettes et grosses protéines n'ont aucune chance. Passent à travers le tamis, dans le désordre, les sucres, les acides aminés et tous les sels minéraux, accompagnés d'une foule d'autres produits chimiques.
Et côté sang, le contenu des capillaires se retrouve hautement concentré : un bon cinquième de son volume passe de l'autre côté de la barrière. Noyé dans un premier jus très dilué, qui a encore peu à voir avec de l'urine.

C'est dans des milliers de petits bouquets de capillaires, les glomérules (photo gauche, en bleu), que la formation de l'urine commence. Le plasma sanguin y traverse une série de trois filtres : la paroi du capillaire, truffée de pores, puis une autre membrane, dite basale, qui fait office de tamis moléculaire, et enfin, les cellules de la capsule glomérulaire, qui s'enchevêtrent aux capillaires (photo droite). Seules les molécules d'un diamètre inférieur à
3 millionièmes de millimètre pourront passer.
RÉABSORBER LES ÉLÉMENTS VITAUX

Pas question de laisser fuir tout ce liquide dans la nature. Car l'organisme se viderait par la vessie, en moins d'une heure...
Maintenant qu'il a tout filtré, le rein doit faire marche arrière et récupérer les éléments vitaux. Et il y met les moyens. Plus question d'utiliser un simple système de filtre. Il faut dépenser de l'énergie.
Les tubes microscopiques, dans lesquels s'écoule l'urine en formation, disposent de toute la machinerie nécessaire.
Dans la paroi, les cellules portent des protéines spéciales, qui fonctionnent comme de minuscules pompes.
Chacune est spécialisée dans la récupération d'un élément : l'une, le glucose, l'autre, une vitamine...
Molécule par molécule, les pompes capturent les composés et les réinjectent dans leur milieu d'origine, le sang.
L'énergie nécessaire, elles la trouvent en consommant le principal carburant de la cellule, l'ATP.
Le procédé est d'une efficacité redoutable : un rein en bon état de marche ne laisse pas s'échapper une miette de glucose ou d'acide aminé dans les urines. Mieux, il fait d'une pierre deux coups. Car en même temps, les pompes aspirent des ions sodium, pour les renvoyer dans le sang. Qui récupère ainsi une grande partie de son sel.

Les lois de la physique font le reste, ou du moins beaucoup.
Lorsque les sels retournent dans le sang, l'eau tend, par nature, à les suivre. Une question d'équilibre : l'eau a tendance à circuler des zones les plus diluées vers les zones les moins diluées.
Comme elle diffuse sans problème à travers les tissus, elle quitte les tubules et rejoint les vaisseaux sanguins.
Par ce simple jeu de poursuite, plus des trois quarts de l'eau soutirée du sang y retournent sans tarder.
Et l'organisme est sauvé de la déshydratation.
Le mécanisme marche aussi à l'envers. En retournant dans le sang, l'eau entraîne, avec elle, des petites molécules. Car elles aussi se déplacent par diffusion, vers les zones les plus diluées.
Certains sels minéraux et des petits composés chimiques suivent ainsi l'eau de façon passive. Et rejoignent, eux aussi, le sang.
Le plus gros est fait : l'essentiel des éléments vitaux, sucres, vitamines, eau et sels minéraux, est retourné dans l'organisme.
D'autres mécanismes d'ajustement, réglés cette fois par des hormones, se chargeront de récupérer encore un peu d'eau ou de sels. Selon les besoins.

Que reste-t-il alors dans l'urine? Toutes les substances indésirables, issues de la filtration du sang, comme l'urée ou l'ammoniac. Ou l'urochrome, ce pigment qui vient de la destruction de l'hémoglobine et qui donne au liquide sa belle couleur jaune.
Certains déchets y sont parvenus par d'autres moyens. Trop gros, ou en raison de leur charge électrique, ils n'ont pas pu être filtrés hors du sang.
C'est le cas, par exemple, de médicaments comme la pénicilline ou les barbituriques.
Pour les éliminer, le rein a eu recours à un ultime mécanisme. Il les a sécrétés directement dans l'urine en formation, à travers la paroi des tubes microscopiques. La technique lui a aussi permis d'augmenter la quantité d'urée et d'ammoniac relarguée.
Quand au sang, il sort du rein, filtré, débarrassé de ses déchets, puis recomposé. Jusqu'au prochain tour.